Essai

La volumineuse GT qui se trouve aujourd’hui sous nos yeux est le fruit de 5 ans de cogitation des ingénieurs Triumph. Certes, il faut dépasser son mimétisme avec la BMW R 1200 RT pour s’en rendre compte, mais à défaut d’audace stylistique, cette Trophy vaut le détour.

La luxueuse version SE possède, en plus des équipements de pointe : suspensions à ajustage électrique (une sorte d’ESA) pour le solo ou le duo, capteurs de pression de pneus, et système audio d’excellente qualité, avec port USB dans le vide-poches pour brancher un iPod.

Côté moteur, le gros 3-cylindres issu de la Tiger 1200 possède un sixième rapport, un antipatinage, un régulateur de vitesse et une transmission finale par cardan. Le freinage est doté de l’ABS mais également d’un couplage mécanique arrière/avant quand le pilote sollicite fortement la pédale de frein.

Le conducteur, lui, peut ajuster sa selle (sous laquelle se loge un U) et sa bulle électriquement, sur deux niveaux. Enfin, un véritable ordinateur de bord entièrement paramétrable renseigne sur la globalité des éléments utiles à la conduite : niveau de carburant, trips, consommation moyenne etc., etc. Parmi les équipements en option figurent les sièges chauffants ; et les poignées, ce qui est plus surprenant sur cette version de luxe.

Salon sur roues

Une fois sur la selle, bien moelleuse, la position est relativement droite, le guidon tombe directement sous les mains. Les leviers s’ajustent via des molettes et les larges rétroviseurs disposent d’un miroir pivotant sur rotule pour affiner le contrôle. À découverte des commandes, on est intimidé par l’abondance de boutons. Mais on est surtout surpris de devoir lâcher la poignée pour régler la bulle ou la radio, d’autant qu’aucune fonction n’est dévolue aux index. La deuxième déconvenue concerne le peu de rangement offert sur la tête de fourche. Seul un petit vide-poches, à gauche, accueille un lecteur radio et un porte-cartes.

Au débéquillage (de la latérale ou de la centrale), l’impression de lourdeur est comparable à celle des concurrentes. La seule différence notable se fait plutôt du côté espace : celui réservé au conducteur, notamment au niveau des genoux, mettra les plus d’1,90 m bien à leur aise.

Un moteur linéaire

Le bloc issu de la Tiger 1200 Explorer gagne un 6e rapport qui tire long pour les parcours autoroutiers : utile pour abaisser la consommation et surtout l’usure des pièces en mouvement. Revers de la médaille : déjà linéaire sur le gros trail, il perd encore du peps sous le poids élevé des carénages. Très à l’aise sur les 4 premiers rapports, il pousse fort de 2.000 à 6.500 tr/min, puis perd de sa superbe sur le reste de la plage de puissance (6.600 à 9.000 tr). Sur la route, il ne faut donc pas hésiter à jouer de la boîte pour dépasser ; une opération facilitée par une boîte de vitesses rapide, silencieuse et parfaitement accordée avec la transmission finale. Celle-ci n’oppose aucun à-coup à la remise ou à la coupure des gaz comme sur une BMW K 1600 GT. Délivrant 134 ch à l’origine, une puissance suffisante sur route, ce bloc ne devrait heureusement pas être trop pénalisé le bridage à 106 ch, qui touchera les hauts régimes, rarement exploités sur ce type de machine. D’un autre côté, cet « overdrive » remplit sa fonction en ramenant la consommation sous les 6 l/100 (5,4 à 5,6 l/100 constatés à un rythme élevé), ce qui devrait offrir une autonomie confortable de 400 km avant réserve.

Tenue de cap de haut niveau

Bien dimensionnée et bien amortie, la partie-cycle est propre à contenir les éventuels mouvements parasites de cette machine de plus de 300 kg. Dès les premiers tours de roues, la Trophy surprend. Bien équilibrée, elle se faufile sans effort dans le trafic à allure lente, et tient bien son cap une fois que le rythme augmente, même avec la bulle relevée. Deuxième bonne surprise, le système TES (Triumph Electronic Suspension) monté d’origine sur la version SE définit un setting plus ferme que son homologue ESA (en option) de la maison BMW. Même en position « confort », la moto jouit d’un bon comportement (très peu d’effet de pompage), quand les mouvements de châssis sont légion chez l’allemande.

Profitant d’un bras de levier important, le conducteur incline la Trophy sans aucun effort et le train avant, précis, permet de rouler bon train, même sur petite route. De ce point de vue, elle s’avère être largement au niveau de la concurrence. Au moment de prendre les freins, le poids de l’engin se rappelle tout de même à vous. Malgré un intelligent couplage mécanique arrière/avant, la Trophy n’est pas une freineuse hors pair. Il faut donc empoigner le levier fermement pour obtenir la puissance nécessaire au ralentissement des 380 kg (avec valises et conducteur).

Verdict. Pour son retour sur le créneau select des grandes routières, Triumph ne s’est pas loupé. Certes, le poids élevé de la Trophy et la démultiplication longue entament le potentiel du 1200 cm3 et le freinage n’est pas des plus mordants. Mais la Trophy est une réussite sur bien des points, à commencer par la protection. Derrière un carénage enveloppant et une bulle réglable efficace, on peut rouler sous une légère pluie sans en ressentir les effets. On profite également d’un équipement vraiment opulent dans cette finition SE pour un prix relativement élevé, 18.870  €, mais qui dépasse 20.000  € chez BMW. Au final, cette nouvelle GT risque de redistribuer les cartes dans la catégorie… Et certaines icônes de perdre leur hégémonie.

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