Motomag : Revenons un peu sur ta carrière. Tu es un des rares pilotes, voire le seul, à avoir roulé en GP vitesse après avoir été champion du monde de cross…
JMB : C’est exact. Après avoir remporté le titre mondial 125 cm3 en 1988 et celui 250 cm3 en 1989, j’ai décidé de partir aux USA pour défier les plus grands pilotes américains chez eux. La première année a été celle de l’apprentissage, mais j’ai tout de même fini deuxième en Supercross. La deuxième saison j’ai remporté les catégories 250, 500 et Supercross. C’est par la suite que j’ai décidé de tenter l’aventure des Grands Prix vitesse.

Motomag : C’était une transition difficile ?
JMB : Oui et non. D’une part, je n’ai jamais vraiment disposé d’une structure et d’une moto de premier plan pour gagner. D’autre part, mon expérience de la course, même si c’était en cross, m’a beaucoup servi. Il y a aussi des gens fantastiques qui m’ont aidé, comme ceux de chez Aprilia ou Kenny Roberts. Je n’ai pas réussi à gagner un titre, seulement des bonnes places et même deux pôles en 500 cm3. Je regrette bien sûr, mais je garde un formidable souvenir de ces années.

Motomag : Tu as aussi remporté le Bol d’Or et les 24H du Mans moto…
JMB : Je devais rouler avec l’équipe N°1 chez Suzuki, avec Morrisson et Lavieille, mais j’ai préféré la N°2 avec des jeunes pilotes comme Sébastien Gimbert et Nicolas Dussauge. C’était plus facile pour moi d’imposer certains choix et de plus, il y avait moins de pression. Nous avons gagné le Bol en 2002 et 2003, ainsi que les 24H du Mans en 2002. Auparavant, j’avais aussi gagné plusieurs Guidons d’Or et Supercross à Bercy.

Motomag : Nous sommes au Tourist Trophy où tu viens de parcourir le tracé de la course avec ta Honda. Qu’en pense-tu de cette course ?
JMB : C’est une course incroyable et certainement très difficile à gérer. Les virages aveugles ou encore le revêtement bosselé me font peur. Mais je ne pense pas que les pilotes qui s’engagent ici sont des fous. Bien au contraire. Pour avoir parlé avec John McGuiness et Guy Martin, je sais qu’ils cherchent avant tout à minimiser les risques. Le travail qu’ils effectuent sur la moto ou encore la faculté à adapter leur pilotage à la configuration de la route est extraordinaire.

Motomag : Cela ne te tente pas ?
JMB : Non, pour deux raisons. La première concerne ma façon de piloter. J’aime trop aller jusqu’au bout des possibilités de la moto et ici il n’y a aucune échappatoire possible en cas de faute ou de casse. La deuxième raison est plus culturelle. Pour les pilotes britanniques la course sur route est une tradition où ils puisent beaucoup de motivation. Ce n’est pas mon cas. J’ai en tout cas énormément de respect pour tous les pilotes qui s’engagent sur ce type de course.

Motomag : Une dernière question ; pourquoi la relève française en cross comme en vitesse tarde à venir ?
JMB : Certains diront que c’est une question de gros sous et ils ont certainement raison. Mais je crois aussi que l’on laisse trop des jeunes, même talentueux, face à eux-mêmes. Dans ma carrière j’ai eu la chance de profiter des conseils d’anciens pilotes comme Roger DeCoster ou Kenny Roberts, des types qui aimaient faire la transition entre deux générations. En France, on n’exploite pas assez ce que les anciens pilotes champion du monde ou de très haut niveau peuvent apporter aux jeunes. C’est pourtant le rôle de la Fédération française de moto (FFM), tout comme est son devoir de veiller à la reconversion des anciens sportifs de haut niveau.

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