Dans le cadre de la mission parlementaire sur l’analyse des causes des accidents de la circulation, les députés ont entendu, mardi 6 septembre, certains acteurs du monde du deux-roues.

Parmi eux, Patrick Jacquot, PDG de la Mutuelle des Motards, a avancé 7 propositions pour aiguiller les décideurs et améliorer la sécurité de tous les usagers de la route.

Voici les propositions en détails et en intégralité :

1. La création d’un véritable continuum éducatif, dès le plus jeune âge, de l’école jusqu’aux formations post-permis. Aujourd’hui, la sécurité routière est réduite à la portion congrue dans l’enseignement scolaire, et les adolescents arrivent à l’âge de conduire un cyclo sans véritable formation ni expérience, à un moment où ils sont en recherche de leurs limites. Si multiplier les messages de prudence est nécessaire, il faut permettre aux
futurs conducteurs de décrypter les interactions entre les modes de transports, mais aussi d’analyser les comportements des usagers en fonction de leurs contraintes propres.

2. Mieux former les conducteurs de 2-roues à moteur à l’analyse des situations à risque. Les motards et les scootéristes sont très attachés à leur statut prioritaire dans la circulation et cette « surconfiance » se cumule aux défaillances de perception, de diagnostic et de pronostic des automobilistes, comme le confirment toutes les études actuelles (IFSTTAR, CERTU, MAIDS). « Les hôpitaux et les cimetières sont pleins de motards et de scootéristes qui avaient la priorité », déplorait Patrick Jacquot le 6 septembre à l’Assemblée Nationale.

3. Former les automobilistes à la détection des 2-roues dans le trafic, en intégrant à la formation de base au permis de conduire automobile l’initiation à la conduite d’un 2-roues. Les statistiques de la Mutuelle des Motards montrent que la fréquence des accidents entre automobilistes et conducteurs de 2-roues baisse de moitié lorsque l’automobiliste a suivi une formation 2-roues, ou est titulaire du permis gros-cube.

4. Créer un véritable décompte officiel du parc roulant 2-roues à moteur, pour mettre un terme aux batailles de chiffres. En 1970, on dénombrait 200 000 gros cubes. Près de 800 000 en 1980. Depuis, tout décompte officiel a cessé, exception faite de l’immatriculation des véhicules neufs, or le parc n’a cessé d’augmenter : si l’on additionne gros cubes, 125 et cyclomoteurs, véhicules neufs et véhicules d’occasion, la Mutuelle estime le nombre de 2-roues en circulation à aujourd’hui 3 millions. Face à 31 millions

5 - Mettre en place un véritable suivi des autos et motos écoles. Aujourd’hui
se multiplient les boîtes à permis, où forfaits-miracle et bachotage ont valeur d’enseignement dans des établissements dont le modèle économique est basé sur le nombre. Résultats, les conducteurs n’apprennent plus à conduire, mais à réussir l’examen. C’est particulièrement vrai en moto où les enseignes qui ont basé leur travail sur la qualité de l’enseignement, comme l’AFDM (Asssociation pour la Formation des Motards), sont rares. Résultat : le taux de réussite au permis gros cube explose (80 %, contre 50 % en auto), mais l’accidentalité des novices aussi : selon la Préfecture de Police de Paris, 30 % des motards tués dans la capitale détenaient leur
permis depuis moins d’un mois. Ce pourcentage de tués monte à 60 % chez ceux qui détenaient le permis depuis moins d’un an.

6 - Créer l’équité entre usagers. Une des mesures annoncées lors du CISR (Conseil Interministériel de la Sécurité Routière) du 11 mai dernier portait sur l’obligation, pour un conducteur de 2-roues, de suivre une formation obligatoire s’il n’a pas conduit de 2-roues depuis 5 ans. Pourquoi pas ? Mais pourquoi ne pas faire la même chose avec les automobilistes, qui partagent le même environnement routier, et sont soumis aux mêmes interactions entre usagers ?

7 - Prendre en compte la fragilité des 2-roues dans l’infrastructure, en intégrant la sécurité des 2-roues dans le cahier des charges obligatoire de tout nouvel équipement routier ou mobilier urbain. Toutes les études démontrent le caractère aggravant de l’infrastructure dans les accidents de moto et de scooter, et la situation empire : la stratégie déployée par les collectivités locales pour restreindre la circulation automobile afin d’inciter les usagers à utiliser les transports en commun abouti à une multiplication des équipements accidentogènes (séparateurs de voies en dur), auxquels s’ajoutent ceux déjà recensés (ralentisseurs non conformes, peintures au
sol inadaptées, etc). Les expériences menées par certaines collectivités, comme le Conseil Général de l’Hérault, montrent que si la fragilité des 2-roues est intégrée dès la conception d’un projet, le surcoût final est de 1 % !

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