Rarement modèle de moto ne nous aura autant tenu en haleine. Photos volées, teasing de la marque par vidéo successives jusqu’à sa présentation au salon Intermot de Cologne le 30 septembre 2014… la Kawasaki H2R et son moteur à compresseur ont obnubilé la planète web pendant des mois.
À quelques heures de notre prise en main, le 5 mars sur le circuit de Losail au Qatar, on nous offre une ultime piqûre de rappel, avec la diffusion sur les réseaux sociaux d’une photo de compteur : le vaisseau attrape 357 km/h !
Jour J
Enfin dans les paddocks, les techniciens, casque antibruit sur les oreilles, démarrent les H2R et commencent à jouer de l’accélérateur, tels un orchestre interprétant l’hymne du Japon en barouf majeur… Le moment est historique. Une vingtaine de ces motos, seulement, assemblées à la main au pays du soleil levant, se retrouveront sur le sol français courant 2015.
Les cinq motards tricolores, les seuls chanceux invités à chevaucher la bête, s’avancent avec précaution, prenant le temps d’admirer la machine diabolique : fin cadre en treillis tubulaire, monobras supportant une jante aux bords internes cannelés pour éviter la glisse du pneu, fourche KYP à cartouches d’air et huile séparées, étriers 4 pistons Brembo M50 sont autant de pièces encore jamais vues sur une Kawasaki.
Une enjambée émue, et nous voici assis à quelques centimètres du 4-cylindres de 998 cm3, équipé d’un compresseur gavé par deux énormes manchons en carbone. Un coup de gaz pour lancer la machine dans les tours, et déjà la turbine nous gratifie d’un « pshhhhiiiit » sensationnel. Ça promet !
Rapide inspection de l’instrumentation, composée de commodos au guidon inédits on règle le contrôle de traction, le paramétrage des modes électroniques d’utilisation du moteur, du frein moteur, de l’ABS et du launch control ; coup d’œil sur l’amortisseur de direction électronique (Öhlins) et, enfin, coup de botte sur le sélecteur équipé d’un quick shifter (en montée uniquement)…
Les projecteurs s’allument sur le circuit de Doha car la nuit tombe. La boîte à sélection type dog ring, comme en MotoGP, passe en première. Sortie des stands, le slick arrière agrippe le sol.
Le premier coup asséné par la Ninja est pour les tympans. Quel râle ! Le second est pour les fesses. Dès 6.000 tr/mn, le 4-cylindres et son compresseur scotchent au fond de la selle à tampon ; l’aiguille termine sa course à 14.500 tr/mn et le compteur dépasse allègrement les 300 km/h en bout de ligne droite.
Le pilote a la tête enfoncée dans la bulle qui semble soudain minuscule. Au freinage, la H2R remet une louche d’efficacité dans le faciès. Le casque se comprime, les gouttes de sueur s’écrasent sur l’écran, les yeux sont éjectés des orbites… « Vas-y Ninja, fais-moi mal ! » En virage, la moto reste relativement agile, vu son poids (216 kg). Et à la sortie c’est reparti pour un violent, très violent déferlement de couple et de puissance. Inédits sur une moto de série, ces 326 ch qui propulsent le train avant vers la Lune… Ça y est, on a traversé la stratosphère !
Un essai des Kawasaki H2 (modèle de route) et H2R (pour la piste only) sera publié dans Moto Magazine n°316 (avril 2015). Abonnez-vous à Moto Magazine en cliquant ici.