Comparatifs

Il est en effet tout simplement impensable, malgré leurs noms évocateurs, de faire du hors-piste avec une Varadero ou une CapoNord !

Prise en main : vous avez dit TT ?

S’il fallait commencer par définir les extrêmes, nous dirions que la Honda se montre la plus apte à abattre de l’autoroute et que la KTM conserve des aptitudes TT.
La japonaise se caractérise par un poids et une surface frontale impressionnants ; l’autrichienne par une conception inspirée des machines d’enduro de la marque (jantes à rayons, roue avant de 21 pouces, leviers courts, etc.).

Alors que sur la première les notions de confort et de sécurité semblent l’emporter sur le reste, sur la seconde c’est plutôt l’efficacité et le gain de poids qui priment. Entre elles, il y a l’Aprilia avec son cadre en alu directement issu des machines sportives, ses jantes à rayons (mais les pneus sont des tubeless), ses formes anguleuses et un embonpoint à mi-chemin entre la Honda et la Kawasaki.

Cette dernière, clone de la Suzuki DL 1000 V-Strom, se caractérise par une ligne qui respire le déjà-vu, de par sa construction classique (réservoir en métal comme la Honda) et sa mécanique en partie apparente. Elle demeure aussi la plus accessible grâce à une hauteur de selle contenue (taille minimum requise 1,72 m).

La BMW, elle, fait presque bande à part. Pas uniquement à cause du bicylindre à plat (en V sur les autres) ou de sa cylindrée supérieure (1170 cm3, entre 942 et 998 cm3 pour les autres), mais aussi par son originalité esthétique due à un habillage de type « puzzle » et aux solutions techniques qui la caractérisent (cardan, suspension Telelever…).

Malgré un gain de poids important par rapport à la 1150, cette dernière mouture de la GS reste impressionnante et ne se présente pas comme la plus facile à domestiquer. Dotée d’un guidon extra-large, de jantes à bâtons (à rayons en option) et d’un réservoir plus petit, elle a tourné le dos aux pistes terreuses. Toutes ces motos disposent de réservoirs de plus de 20 litres et d’une bulle de protection. Nécessaire et suffisant pour entamer un périple en Bretagne.

Juste après la barrière de péage de l’A10, au moment de ranger le ticket d’autoroute, la surprise est de taille : la seule à proposer un compartiment à l’avant est la KTM. Sur les autres, rien, et ce malgré leur vocation touristique. Pour arriver jusqu’ici, il a fallu traverser la région parisienne et sa circulation ; cela n’a pas été une vraie partie de plaisir avec certaines motos. Les quatre équipées de l’injection ont donné des signes de dysfonctionnement à basse vitesse, notamment à une allure constante : à-coups avec la Kawasaki et la BMW et régime irrégulier avec l’Aprilia. La Honda, elle, avait tendance à caler au démarrage si on ne donnait pas assez de gaz. La seule à n’avoir posé aucun problème est la KTM avec ses bons vieux carbus !

Côté prise en main en revanche, aucune remarque particulière, si ce n’est l’embrayage à sec toujours peu progressif de la GS, l’important poids de la Varadero, le guidon lointain de la CapoNord, l’avant un peu récalcitrant de la KLV ou encore la hauteur de selle de l’Adventure. Mais dans l’ensemble, ces grosses motos font preuve d’un excellent équilibre et d’une étonnante facilité de conduite dans le trafic urbain.

Moteur : vive les twins !

Nous voilà enfin sur la presqu’île de Crozon. Quelle est la plus drôle, la plus alléchante, la plus rationnelle ou encore la plus efficace ? Les interrogations et les suppositions vont bon train à la table du petit routier du midi. Émerge une évidence partagée par tous : apprivoiser des motos de plus de 220 kg avec les pleins, avec un centre de gravité haut placé et des empattements interminables, ce n’est pas une sinécure. Les moteurs, tous des bicylindres qui ronronnent tranquillement à 130 km/h, affichent un régime inférieur à 5 000 tr/min (de 4 300 pour la Kawa à 4 950 pour l’Aprilia).

Les consommations, malgré les fortes cylindrées et une surface frontale importante, restent inférieures à 7 l/100 km, autorisant ainsi une autonomie plus que confortable, en adéquation en tout cas avec l’orientation routière de ces machines. Bilan de ce chapitre autoroutier : la GS ne peut prendre l’ascendant sur la Varadero et la KTM ferme naturellement la marche.

Pour les moins grands, les moins expérimentés, ou encore lorsque la fatigue se fait sentir en fin de journée, ces machines ne sont pas toujours faciles. Chaque arrêt dans un dévers ou un demi-tour sur une route étroite requiert une certaine attention.
La Bretagne est magnifique, mais Lionel « préférerait de motos plus légères et maniables pour mieux profiter du paysage… » Malgré une hauteur de selle redoutable et une conception TT qui laisse prévoir une conduite rude et musclée, la KTM est celle qui offre le plus de plaisir et d’aisance.

Avec sa roue de 21 pouces, elle n’est certes pas la plus facile à inscrire en virage : la fourche plonge exagérément à chaque freinage, la sensation de grip au sol est la moins perceptible... Mais sa partie-cycle facile et homogène, sa stabilité en courbe ou encore sa capacité à absorber les imperfections de la route en font une moto ludique, efficace et sûre.

Aucune des machines de ce comparatif ne peut rivaliser avec l’autrichienne au chapitre des suspensions. Seule la Varadero le pourrait, mais la souplesse de ses amortisseurs ne lui permet pas de suivre la LC8 lorsque le rythme s’accélère. Le moteur, malgré un couple et une puissance inférieurs, est étonnamment souple et linéaire, surtout à moyen régime. L’accord entre la puissance et les capacités de la partie-cycle est parfaitement réussi et rend cette moto plaisante à conduire. Quant à l’ensemble de la transmission, elle est d’une onctuosité qui contraste avec l’embrayage à sec et le cardan de la BMW.

La R 1200 GS, justement, a agréablement surpris ceux qui n’avaient jamais conduit cette nouvelle version. À commencer par la souplesse dont fait désormais preuve le bicylindre Boxer. La partie-cycle n’est pas en reste, surtout lorsque la route ne cesse de tourner. La GS est le gros trail qui possède le centre de gravité le plus bas.

Autant dire que dans les portions lentes elle est extrêmement facile à manier et très difficile à suivre. Certes, le poids, les réactions dues au couple de renversement du moteur, les à-coups de la transmission par cardan, sans oublier la puissance du freinage avant, demandent un certain temps d’adaptation. La boîte aussi, malgré les progrès accomplis, demande à être comprise…

Mais d’entrée, on ne peut qu’apprécier l’homogénéité de cette BMW, difficile de prendre en défaut y compris au niveau de la stabilité à haute vitesse. Le gain de puissance à haut régime est perceptible surtout en duo ou lors des reprises, mais ce n’est franchement pas la principale qualité de cette GS, surtout en utilisation tourisme.

Le moteur de la KLV possède une puissance considérable, tout comme celui de l’Aprilia. Ces deux bicylindres sont dérivés de motos sportives (Suzuki TL et Aprilia RSV) et ce n’est que grâce à des modifications au niveau de la distribution et de l’alimentation qu’ils ont pu trouver place dans des châssis à vocation routière.

Mais cette puissance est encore un peu trop haut placée et ces deux machines se révèlent un peu moins agréables que les autres à utiliser sur petites routes à cause de reprises un peu laborieuses au-dessus de 4 500 tr/min.
- Ici plus qu’ailleurs il faut jouer avec la boîte de vitesses, pas très agréable d’ailleurs sur la Kawasaki, pour ne pas faire cogner les mécaniques. Lors des accélérations un peu poussées, les deux twins affichent en revanche une très bonne santé, avec en prime une belle sonorité pour la KLV et un sifflement de cocotte-minute pour la CapoNord.

Comportement : le poids de la raison

Dans ce domaine, s’il n’y a que des compliments à faire au niveau de la stabilité (surtout l’Aprilia), il apparaît évident que les deux motos ne font pas preuve d’une très grande agilité à basse vitesse. Le train avant assez « ouvert » (pour favoriser la stabilité) sur la Kawasaki et un centre de gravité assez haut sur l’Aprilia en sont les principales causes.

Paradoxe, ces deux machines sont les plus faciles à prendre en main et les moins exclusives.
Ceci aurait pu être le cas aussi pour la Varadero qui, impériale sur les grands trajets, perd un peu de sa superbe lorsque la route se rétrécit. Non pas à cause de son moteur, plein à tous les régimes, ou de sa partie-cycle, toujours aussi simple d’utilisation et sûre, mais à cause de son poids qui demande une attention particulière lors des petites manœuvres.

D’une neutralité surprenante par rapport à son volume, confortable même sur route défoncée, la Varadero propulse avec tranquillité et force à la fois. On penche la moto avec aisance et progressivité, on enroule les virages avec confiance, tout en sachant que l’on dispose du freinage le plus sûr.
Mais il faut toujours se rappeler son surplus de poids car rattraper un écart de trajectoire est forcément plus difficile qu’avec la KTM. 
- Avec cette Honda, tout comme l’Aprilia et la Kawasaki, il y a bien longtemps que la raison a pris le pas sur la passion. Et sur ces terrains étriqués, l’allemande se fait damer le pion par l’autrichienne. L’élève aurait-il dépassé le maître ?

Mais revenons à l’autoroute pour parler du confort. Les maîtres mots en sont l’assise, la protection et les trépidations aux régimes usuels. La seule à devenir gênante pour cause de vibrations, au niveau du guidon, du réservoir, des repose-pieds (et aussi des rétros) est la KTM. 
Sur la KLV, elles se manifestent aux mains et aux pieds, sur la GS aux poignets.
La CapoNord et la Varadero en sont quasiment exemptes. La Honda est de loin celle qui protège le mieux, tant le haut que le bas du corps, alors que l’Aprilia est la plus décevante à cause des turbulences qu’elle génère.

La BMW a notre faveur au niveau des pieds et des jambes, contrairement à la KLV qui y canalise la pression du vent. Sans quelques remous d’air à hauteur du ventre, la Kawa serait presque au niveau de la Honda.
- Quant à l’Adventure, elle n’est pas si mal compte tenu de l’étroitesse de sa bulle (ce sont les épaules qui prennent), mais elle pèche par une selle étroite et relativement ferme.

Une dureté partagée par le siège de la Honda, qui se rattrape néanmoins par sa confortable largeur. Côté position de conduite, la Caponord, la KLV et la Varadero donnent au pilote l’impression d’être « encastré » dans la moto et passif, alors que la LC8, de par son étroitesse et l’horizontalité de sa selle, offre le sentiment d’être haut perché et forcement plus actif.
Sur la BMW, c’est un peu le juste milieu. Notons aussi son guidon trop large pour les petits gabarits.

VERDICT

Sans attrait esthétique prononcé ni équipement spécifique au tourisme en série, la KLV compense son manque de personnalité par un rapport prix/possibilités d’utilisation imbattable. La Varadero est le meilleur choix pour tous ceux qui cherchent une vraie GT, sûre et confortable, mais il faudra composer avec son poids et sa hauteur de selle.

La CapoNord est une bonne moto sans gros défaut mais sans attrait particulier non plus. Bien équipée, proposant un ABS, elle ne réussit cependant pas à apporter un plus dans la catégorie. Un semblant de changement nous arrive d’Autriche avec la KTM Adventure.
- En respectant à la lettre la philosophie du commencement (autrement dit celle de la R 80 GS) mais avec un moteur et une partie-cycle moderne, cette moto a le grand mérite d’être la seule capable de mettre ses pneus sur une piste. Et même si son prix d’achat est salé et sa fiabilité à démontrer, elle séduit immanquablement.

Quant à la GS, si elle marque le pas face à la Varadero sur autoroute et face à la KTM en parcours sinueux, elle reste la machine la plus aboutie des trails routiers. Le confort est de premier plan, chaque détail est pensé pour une utilisation touristique, elle est relativement économique à l’usage et garde une cote de revente assez haute…
Le tableau serait presque idyllique s’il n’y avait un prix d’achat élitiste et des accessoires qui se monnaient au prix fort !

Avec la participation de Gilles Andrien, Henry Contant et Lionel Parmeggiani

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