S’agissant du visa, une fois n’est pas coutume en Afrique, il suffit de le demander directement à l’arrivée dans l’aéroport, pour la modique somme de 15 euros !

Un moto-club pas comme les autres
Simone Ferrari, malgré son nom italien, est un Éthiopien. Il est né et a toujours vécu ici. Son père est venu d’Italie, la seule nation qui a réussi à envahir l’Éthiopie pendant quelques années avant la Seconde Guerre mondiale.
C’est Simone qui, avec ses copains Izhar, Ambra, Yacob, Christophe et Carlo, décide de fonder en 2008 l’association motocycliste des Gelada Riders (Gelada est le nom que l’on donne aux singes endémiques qui vivent dans les hautes parois des monts Simien). « L’association avait pour but de réunir toutes celles et ceux qui pratiquent la moto à Addis-Abeba et dans les alentours, une vingtaine de personnes en tout. Mais aussi de se rencontrer, échanger nos compétences mécaniques et de faire du tourisme à moto. Ici en Éthiopie, il n’y a pratiquement pas de motos et encore moins de mécaniciens.
Quant aux pièces de rechange ou aux pneus, il faut les importer d’Europe ou de Turquie à un prix exorbitant. »

Dans le groupe, on trouve des garçons et des filles originaires des différents pays qui travaillent pour des ONG, dans les ambassades ou comme professeurs dans des écoles. Mais la majeure partie des membres est originaire d’Éthiopie.
Côté motos, les trails et enduros sont majoritaires : Africa Twin, Yamaha XT, Honda XR et même KTM 690. « Ici, nous explique Flavio, 5 % des routes seulement sont goudronnées et ces motos, ce sont les seules à pouvoir se déplacer dans le pays. » C’est ce garçon, fils d’une Éthiopienne et d’un Italien, qui a réussi à importer avec beaucoup de tracasseries administratives quelques KTM, et qui organise des tours en Éthiopie avec son association Africa Riding Adventures Tours (lire encadré). C’est aussi grâce à lui que notre découverte de l’Éthiopie a été possible.

Lors de notre rendez-vous pris dans un bar de la plus grande avenue d’Addis-Abeba, c’est encore lui qui nous explique comment s’organise notre sortie vers le lac Langano. « Comme pour mes raids, on part toujours avec un 4x4 d’assistance pour transporter essence, outillage, quelques pièces de rechange et du matériel médical de premier secours. En dehors de la capitale, on ne trouve presque rien. Il faut savoir réparer une crevaison, une petite panne mécanique, mais aussi être capable de dispenser des soins. »

Addis-Abeba surprend, le reste enchante
Un séjour à Addis-Abeba exige une petite période d’acclimatation car la capitale éthiopienne est perchée à plus de 2 500 m d’altitude, comme pratiquement les trois quarts du pays. Nous en profitons pour visiter le fameux Mercato, le quartier Piazza, le quartier des bijoutiers, ainsi que la gare construite par les Français qui est le départ d’un long périple en train jusqu’à Djibouti.
C’est une ville très animée le soir, entourée de forêts mais aussi de bidonvilles, avec ce que cela comporte de mendiants et d’enfants qui traînent dans les rues… Même si on est dans la corne orientale de l’Afrique, que le peuple d’ici ne ressemble à aucun autre sur le reste du continent et que la religion est orthodoxe, impossible de ne pas se pencher à nouveau sur la condition humaine, comme à chaque fois que l’on voyage sur le continent africain.

Un trafic chaotique
En sortant de la ville, vers Dabra Zeit, Nazareth et le lac Langano, on retrouve en revanche une Afrique plus familière, avec tout le chaos que cela suppose. Plus de 80 % du pays vit d’agriculture et de commerce. L’activité qui règne sur l’unique route qui descend vers le sud est incroyable. Il faut affronter un trafic dense, avec des camions d’un autre âge, des charrettes tirées par des bœufs, des piétons… Mais le goudron ne dure que quelques kilomètres, ensuite, c’est la piste à perte de vue, poussiéreuse et imprévisible : nuées d’enfants sortant de nulle part lors des traversées des villages, animaux vagabonds et gens qui marchent, qui marchent et marchent encore. Dans aucun autre pays du monde on ne voit autant de gens marcher.
Parfois, la piste est pratiquement impraticable à cause des énormes ornières creusées par l’eau pendant la saison des pluies. On roule alors presque au pas et en position debout, pour voir le plus loin possible. Les paysages, quant à eux, ne cessent de changer et après chaque col franchi, c’est une nouvelle immensité qui surgit, encore plus majestueuse que la précédente.

Plus loin, dans la région du lac de Tana, vers Lalibela, dans les montagnes du Tigré ou dans le parc national du Simien, cette grandeur, selon Simone, est encore plus perceptible. Nous n’en goûterons les charmes que lors de virées de quelques jours avec les motos de l’agence de Flavio.
Le reste du temps, nous emprunterons les transports locaux. Une autre expérience, unique elle aussi, qui ouvre sur les rencontres et met à rude épreuve le temps des pendules tant les distances à parcourir apparaissent interminables.

Un pays à découvrir
Notre balade autour du Rift continue tant bien que mal, et le rythme, pourtant tranquille, est dur à tenir. Est-ce l’altitude, le stress ou le dépaysement total qui font que les heures qui passent sont toujours plus difficiles ?
Noël approche et ici c’est la saison sèche. Et à 18 heures, c’est la nuit. Nos compagnons de route, eux, sont habitués à ces conditions parfois très rudes… Nous pas !
Robel, le moins expérimenté du groupe mais certainement le plus drôle, ne cesse de tomber avec sa XT 600 tandis que Carlo et Ambra galèrent avec leur Toyota pour rester au contact. Les crevaisons à répétition dues aux nombreuses épines, ou les petites pannes de ces machines pas toujours fraîches, sont en tout cas l’occasion d’une halte toujours joyeuse. Dans le petit restaurant d’un village sur les montagnes qui bordent le lac Longano, on se dit qu’on a de la chance de vivre des moments pareils avec des gens d’ici.
Comme partout, la passion de la moto est un véritable vecteur d’échange et d’amitié. Difficile de ne pas rêver non plus à l’évocation du lac de Tana, des sources du Nil Bleu, du désert volcanique du Danakil ou de la ville d’Harar (là où vécut un certain Arthur Rimbaud) comme prochaine destination. Et on en arrive tous à la même conclusion : l’Éthiopie est à découvrir vite, avant que la destination ne devienne la proie des voyagistes.

Actuellement, avec les événements en Libye ou en Syrie, c’est un pays quasi impossible à rejoindre à moto et il faudra recourir aux services de l’unique agence qui propose des tours en 2-roues. Certes ce n’est pas donné (voir encadré p. 101), mais cela permet de visiter le pays en moins de temps, en toute tranquillité et surtout, c’est de l’argent qui reste dans le pays car il s’agit d’une agence locale.

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