Contrairement à la bien-pensance largement répandue chez nos décideurs, la relation de causalité entre vitesse et mortalité n’est pas aussi évidente que nous pourrions le croire. C’est du moins ce qu’illustre l’expérimentation « Tempo 140 » conduite par l’Autriche. Ainsi, en 2018, Norbert Hofer, alors ministre des Transports, passe les limites de vitesse de 130 à 140 km/h sur 120 km d’axes autoroutiers, entre Vienne et Salzbourg.

« Le trafic est plus fluide (...) les autoroutes peuvent supporter une vitesse de 140 km/h - pas partout - mais sur les longs tronçons » déclarait le ministre conservateur en août 2018 dans le quotidien autrichien Die Presse. « Le progrès n’est pas en conflit avec la sécurité routière et l’environnement » complétait l’homme. Et si la phase de test a été arrêtée au 1er mars 2020, suite à un remaniement gouvernemental, les chiffres de l’accidentalité communiqués par l’Asfinag (gestionnaire du réseau routier et autoroutier autrichien) dévoilent des résultats surprenants.

Accidentalité en baisse et légère hausse des émissions polluantes
D’après le rapport établi par des « experts indépendants » aux dires de l’Asfinag, la hausse de la vitesse moyenne constatée n’aurait été comprise, selon les conditions météo et de circulation, qu’entre 2 et 4 km/h. En Basse-Autriche, la moyenne mensuelle d’accidents serait passée de 4,3 (entre 2014 et 2017) à 2,2 lors de la période « Tempo 140 ». En Haute-Autriche, cette même moyenne passe de 1,2 à 0,5.

Quant aux émissions polluantes, les données récoltées resteraient peu ou prou les mêmes qu’à 130 km/h, toujours selon l’Asfinag. Sa porte-parole, Alexandra Vucsina-Valla a parlé d’une « hausse marginale » de 1 à 2 % des concentrations de dioxyde de carbone et des oxydes d’azote. À noter que les camions ont été exclus de l’expérimentation du fait de leurs plus fortes émissions polluantes.

Des causes multiples pour expliquer la survenue d’un accident
Si le projet de hausse de la vitesse maximale autorisée a été enterré avec la crise politique qui a secoué l’Autriche en mai 2019, cette expérimentation a toutefois le mérite de remettre les pendules à l’heure. Ainsi, elle nous rappelle que la lecture de l’accidentalité à travers l’unique prisme de la vitesse relève de la communication politique.
Comme l’indiquait déjà Jean-François Caillars, président du Conseil médical de la Prévention routière en 2006 : « Les accidents de la route résultent de la combinaison de multiples facteurs : la puissance et la conception des véhicules, leur état de fonctionnement , la qualité des voies de circulation, les conditions climatiques, la réglementation et la façon dont elle est imposée sont autant de déterminants qui sont à mettre en parallèle avec l’état de santé mais aussi les valeurs, les attitudes et les comportements des conducteurs, tout ce qui constitue ce « facteur humain » dont on sait qu’il est impliqué dans près de 90% des cas ».

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